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Narmada River by Marianne |
POEMES POUR LA NARMADA.
Narmada Sutra/ Mehta Gita.
Interprétation d’un poème de Shankaracharya par un ménestrel sur les rives de la Narmada.
Les sages ont dit :
Puisse celui qui chante tes louanges
A l’aurore, au crépuscule, à la nuit,
Sous sa forme humaine
Acquise dans la souffrance de
Tant de naissances,
Approcher dans l’honneur
Les pieds de Shiva lui-même.
Entend donc mes louanges ;
O Narmada sacrée.
Ta présence est
Une grâce pour la terre.
Les fidèles te nomment Kripa,
La grâce même.
Tu purifies la terre
De ses impuretés.
Les fidèles te nomment Surasa,
L’âme sacrée.
Tu traverses la terre en bondissant
Comme un cerf qui danse.
Les fidèles te nomment Rewa,
La bondissante.
Mais Shiva t’a nommée Délicieuse
Et, dans son rire,
Il t’a donné le nom de Narmada.
Eau couleur de cuivre
Sous un ciel couleur de cuivre,
De la pénitence de Shiva tu es devenue eau.
D’eau tu es devenue femme
Si belle que dieux et ascètes,
La chair tendue de désir,
Ont abandonné leur contemplation
Pour te suivre.
Une fois, seulement,
Depuis que tourne la roue de l’existence
Le terrible s’est ému jusqu’à rire.
Levant les yeux de sa contemplation interne
Pour les poser sur toi, le destructeur a dit :
Ô demoiselle aux belles hanches
Evocatrice de Narma, le désir,
Tu seras pour tous Narmada
La plus sacrée des rivières.
O rivière née de la pénitence,
Baptisée par le rire,
Le lacis désordonné de tes eaux
Est serti dans la roche des monts Vindhya
Comme la dorure de l’ichor sur l’eau de l’éléphant.
Le long des rives
Les étamines des fleurs de Nipa mordorées
Percent l’enveloppe de leurs pétales
Dans le désir pour toi.
Les bois lourds de jasmin sauvage
Te ceignent de leur parfum.
Au bruit de tes pas, les jeunes manguiers
Se couvrent soudain de fleurs.
Les sages en méditation sur tes berges te disent
Deux fois née,
Une fois de la pénitence,
Une fois de l’Amour.
Selon eux, l’Ascète, dans ses ébats avec la déesse,
A mêlé la sueur de son ardeur aux fatigues de l’amour
Souriant de ses seins,
Et t’a changée en rivière
Pour refroidir le désir des saints hommes
Et t’a nommée Narmada,
Celle qui apaise les passions.
Il n’est pas jusqu’à la semence de Shiva
Que ton lit froid ne durcisse comme la pierre,
Et chaque goutte devient
Une idole à arracher à tes eaux noires bleutées,
A vénéré avec des guirlandes de fleurs
Dans les temples qui bordent les rives.
Ô rivière née de l’amour,
Baptisée par le rire,
Tes eaux pourpres glissent comme un vêtement
De tes berges lisses.
Kalidasa s’interroge : qui pourrait seulement t’abandonner ?
Qui donc pourrait abandonner une femme, les reins recouverts,
Quand il a connu la douleur de son corps ?
Le tracé de ton cours
Fait des bonds d’antilopes
Sur les places des villages qui te bordent, l’ombre
Des arbres sacrés grouillent d’oiseaux.
Des pommes de merveille assombrissent ton eau
Du lustre des fruits mûrissants.
Des mangues sauvages choient dans les remous de ton courant
Telles des fleurs dans les cheveux d’une jeune fille.
Il est dit dans les Ecritures
Que tu étais présente à la naissance du temps
Quand Shiva, sous la forme d’un paon doré,
Errait par l’océan du vide.
Tu as rappelé le destructeur
Que la création n’attendait qu’un ordre de lui.
Alors, déployant ses redoutables plumes,
Shiva a procréé ce monde et la montagne
Où il médite
Jusqu’à l’heure de la destruction.
Tu étais présente à la Création,
Par la seule volonté de Shiva toi seul resteras
A l’heure de la destruction.
Il est prédit par les sages qui connaissent la vérité :
A minuit, à l’heure où monteront les flots sombres,
Une jeune fille tu deviendras
Eclatante comme une colonne de lustre.
Un trident dans ta main menue, tu diras :
Sages, quittez vos ermitages sylvestres
Sans plus tarder. Voici venu le temps de la grande destruction.
Pendant que les destructeurs dansent
Tout sera détruit.
Moi et moi seule suis sanctuaire.
Venez, avec votre connaissance de l’humanité,
Suivez-moi.
Je vous conduirai à la prochaine création.
Ô messagère du temps qui passe,
Ô sanctuaire du salut
Tu dissipe la peur du temps lui-même.
Ô Narmada sacrée.
Tu effaces les taches du mal.
Tu libères la roue de la souffrance.
Tu soulages les mondes de ses fardeaux.
Ô Narmada sacrée.
Bardes et acètes chantent tes merveilles.
Joueurs, tricheurs, danseurs chantent tes louanges
Tous, nous trouvons refuge dans ton étreinte,
Ô Narmada sacrée.
Poème de Shankaracharya.
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